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La poire et la Révolution

La poire et la Révolution

Les noms donnés aux fruits ont une origine très variable.
Ils ont parfois été donné en souvenir d'événements ou en l'honneur de personnages historiques.
La région ayant été le théâtre de la plus importante guerre civile de l'Histoire de France, la Guerre de Vendée (1793-1796), il n'est pas surprenant que certaines poires aient pour nom celui de personnages  aux idées proches du mouvement vendéen.

Choisis généralement par leur obtenteur/découvreur, ceux donnés parfois aux poires ont la particularité d'être le reflet évident de la sensibilité politique de leur auteur.
La répression a notamment été si violente que beaucoup en sont restés longtemps comme choqués et ont nommés leurs trouvailles avec nostalgie. 

Ainsi, un nombre non négligeable de poires, nommées au cours du XIXème siècle ont ainsi reçu un nom qui n'était pas "politiquement neutre".
Ceux donnés aux nouveaux fruits ont parfois été le reflet de l'instabilité politique de ce siècle.
Le sentiment de régréter l'Ancien Régime, certainement consécutif aux excès qui avaient été commis par des extrémistes arrivés au pouvoir peu de temps après 1789, était très commun au XIXème dans toute la Région Ouest.

Le monde des pépiniéristes de l'époque était à la base conservateur et l'obtention de nouvelles poires était aussi généralement le hobby d'amateurs "de bonne famille", souvent des nobles.
Ces deux points font que le souvenir de cette guerre civile a pendant relativement longtemps influencé les noms donnés aux nouvelles poires.

La poire "Duchesse d'Angoulême" 1

La première (et la plus célèbre) a sans doute été la "Duchesse d'Angoulême". Marie-Thérèse, fille de Louis XVI et de Marie-Antoinette, n'a jamais pris part aux guerres de Vendée (jeune exilée à l'époque) mais est restée pour certains comme le symbole vivant de l'Ancien Régime.

Découverte en 1809, initialement nommée "Poire des Eparonnais" par un pépiniériste angevin (A. P. Audusson), elle fut renommée "Duchesse d'Angoulême" lorsque sa "marraine", profitant de la Restauration, est revenue d'exil et a sillonné le pays (le terme "Duchesse" devint ensuite un mot pour accentuer (à tort ou à raison) l'excellence supposée de certaines poires).
On la rebaptisa donc environ 10 ans après sa mise sur le marché.

La poire "Duchesse de Berry " 2

En 1827, un pépiniériste de Nantes nomma une poire qu'il avait trouvé à St-Herblain (localité de la banlieue sud de cette ville), en l'honneur cette fois-ci de la Duchesse de Berry (Marie-Caroline de Bourbon-Siciles, belle-soeur de la précédente), personnage certes férue de botanique mais surtout connue comme étant le fer de lance d'un nouveau mouvement royaliste basé sur la révolte chouanne. Ce fut un flop...

Plus tard, pour la différencier d'une poire "à compote" d'origine berrichonne, communément cultivée dans les fermes de la région, la "poire de Curé", on ajouta à son nom la mention "d'été".

La poire "Général de Bonchamps" 3

En 1854, on nomma une poire qui avait été obtenue depuis assez longtemps en l'honneur d'un général vendéen ("armée d'Anjou") , le marquis Charles de Bonchamps, dont le tombeau se trouve dans la même commune, à St-Florent-le-Vieil.
Cette poire a été nommée en l'honneur du héros local.

La poire "Duchesse de Bordeaux" 4

Vers 1860, M. Sécher, amateur habitant à Montjean (49), fidèle à la tradition familiale, nomma une nouvelle poire née chez lui "Duchesse de Bordeaux" en l'honneur cette fois-ci de l'épouse du Duc de Bordeaux (Comte de Chambord), qui avait prétendu au pouvoir.
Ce fruit a pour synonyme commun "Beurré Perrault".

Les poires obtenues par Eugène des Nouhes (1812-1902)

Cet homme était un "vendéen convaincu".
Héritier d'une ancienne lignée de la noblesse qui avait pris une part active aux Guerres de Vendée, le Comte de la Cacaudière demeurait au château du même nom à Pouzauges (85).


Parmi les poires qu'il présentait généralement à la Société d'horticulture de Nantes, pour affirmer sa nostalgie de l'Ancien Régime, on peut retenir ces noms :

  • "Royale-Vendée" 5
  • "Comte de Chambord" 6 (Henri d'Artois, Duc de Bordeaux, fils de la Duchesse de Berry, neveu et filleul de la Duchesse d'Angoulême)
  • "Général de Charrette" 7 (un chef des armées vendéennes)

Le souvenir de cette époque peu glorieuse de notre histoire, bien que toujours vivace chez certains, s'est estompé avec le temps. La dernière poire restée célèbre à avoir reçu un "nom royaliste" fut certainement la poire "Comtesse de Paris" 8, obtenue à Dreux par le député William Fourcine en 1885. 

Toutefois quelques années plus tard, l'obtenteur angevin A. Hérault, né en 1816, héritier d'une riche famille de Cholet et né à cet endroit, nomma cette fois-ci une de ses nouvelles poires "Souvenir de Valmy" 9 pour se remémorer la première victoire décisive hors de France de l'armée révolutionnaire en 1792 .

1 Dictionnaire de pomologie , André Leroy, tome 2, pp 98 à 101 (1868)
2 Notices pomologiques, Jules de Liron d'Airoles, tome 1, pp 5 et 6 (1858)
3 Dictionnaire de pomologie , André Leroy, tome 2, pp 211 à 213 (1868)
4 Dictionnaire de pomologie , André Leroy, tome 2, pp 105 et 106 (1868)
5 Dictionnaire de pomologie , André Leroy, tome 2, pp 607 et 608 (1868)
6 Catalogue descriptif des fruitsadoptés par le congrès pomologique, Société pomologique de France, p 155 (1887)
7 Annales et résumé des travaux, Société nantaise d'horticulture, p 68 (1889)
8 Bulletin d'arboriculture…, F.Burvenich, p 19 (1905)
9 La pomologie française, Société pomologique de France, pp 381 et 382 (1896)